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Avec nos remerciements pour ces trésors à la société Promoédition, éditeur de : Heure Suisse, l'Année Horlogère Suisse et du Journal Suisse de l'Horlogerie.
L’âge d’or (JSH 1954) (4ème partie)
      Par Pierre Audemars
Au cours du  XVIIIe siècle la fabrication des montres astronomiques fit place, peu à peu, à  celle des montres indiquant la date et, généralement, les phases de lune. Ces  montres-calendrier primitives étaient toutes du genre simple, c'est-à-dire qu'à  la fin de chaque mois de moins de 31 jours l'aiguille des jours devait être  avancée à la main.
      L'adjonction au mouvement du mécanisme compliqué de  calendrier perpétuel dans lequel, tous les quatre ans, le 29 février serait  enregistré automatiquement, était depuis longtemps le rêve de chaque horloger.
  A la Vallée de  Joux, Charles-Henri Audemars fut le premier à émettre des idées pratiques sur  la manière de résoudre ce problème.
A la Vallée de  Joux, Charles-Henri Audemars fut le premier à émettre des idées pratiques sur  la manière de résoudre ce problème.
      Les avis sont  partagés quant à savoir qui fut l'inventeur de la première montre à calendrier  perpétuel. Marcel Piguet accorde cet honneur à Elisée Golay, des  Piguet-Dessous, qui fit sa première montre à quantième perpétuel en 1853.  D'autre part, les auteurs de La Montre Suisse attribuent la fabrication du  premier mécanisme de ce genre à Louis-Elisée Piguet, ce grand pionnier dans le  domaine des montres compliquées, qui l'aurait exécuté la même année, alors  qu'il était âgé de dix-sept ans.
      G.-H. Baillie, de  son côté, mentionne Golay comme étant l'inventeur d'un calendrier perpétuel et  Piguet comme ayant conçu le premier mécanisme de calendrier perpétuel, les deux  en cette même année 1853.
      Il est possible  qu'ils soient arrivés à la même solution indépendamment, mais cette coïncidence  plutôt singulière pourrait peut-être trouver son explication dans le fait que  tous deux portaient le même prénom : Elisée, et qu'Elisée Golay venait des  Piguet-Dessous.
Aussi, la clé de  l'énigme ne se trouverait-elle peut-être pas dans une erreur d'impression d'un  des anciens écrits horlogers ? A défaut de preuve formelle, la balance semble  pencher légèrement en faveur d'Elisée Golay, car il est certain que  Louis-Elisée Piguet est né en 1836, et même pour un génie pareil l'âge de  dix-sept ans ne paraît guère être le plus propice à l'accomplissement d'un  travail de ce genre.
En 1860, la maison Louis Audemars sortit la première montre à calendrier perpétuel sans aiguille rétrograde. Cette innovation, qui comportait un cadran de 48 mois faisant une révolution en 4 ans, était plus sûre et moins onéreuse. Elle avait en outre sur les modèles d'alors l'avantage, si la montre venait à s'arrêter, de permettre la remise à jour du calendrier sans difficulté.
 Il semble y avoir  un peu de flottement quant à la date exacte de l'invention de la montre à  répétition à minutes, c'est-à-dire, dans les mécanismes de grande sonnerie, la  complication additionnelle faisant sonner les minutes aussi bien que les heures  et les quarts à volonté plutôt qu'en passant, quoiqu'à la Vallée de Joux on  pense que Philippe Meylan fut le premier à construire cette cadrature  compliquée et à l'enseigner à ses apprentis.
      Malgré  l'importance de cette invention, elle ne semble avoir été adoptée que beaucoup  plus tard, ce qui explique que la date généralement admise aujourd'hui se situe  entre 1823 et 1840. Il y avait alors très peu d'hommes capables d'entreprendre  la construction de ce mécanisme si compliqué, et on sait que Louis Audemars  était du nombre.
 Les premières  montres compliquées à grande sonnerie, combinées avec une répétition à minutes,  comportaient généralement trois rouages, un pour les heures, un pour la  répétition à minutes à volonté, et un pour la sonnerie des heures et des quarts  en passant.
      En 1858, la  maison Louis Audemars fit étudier par Henri Golay de la Forge, du Brassus, qui  s'était établi à Genève en 1833, le premier calibre de ce genre, mais ayant  deux rouages au lieu de trois.
      En partant de ce  calibre, Louis-Elisée Piguet, du Brassus, alors apprenti d'Henri Golay,  construisit la première montre de ce genre n'ayant qu'un seul ressort et une  seule cadrature, à la fois pour la répétition et pour la sonnerie des heures et  des quarts en passant.
      Cette importante  réduction de deux mécanismes en un seul permit plus tard à la maison d'adapter  ce calibre à son système de remontage au pendant.
Henri Golay de la Forge était un horloger d'une habileté consommée qui se spécialisa dans la fabrication des montres à grande sonnerie de tous genres. Il s'était fixé à Genève sous les auspices de la maison Louis Audemars, et il y forma et instruisit presque tous les maîtres-horlogers qui ensuite retournèrent à La Vallée pour se vouer à ce travail particulièrement délicat et hautement spécialisé.
 Un bon nombre de  réussites techniques importantes de la maison, à cette époque, étaient dues au  génie fécond de Charles-Henri Audemars, huitième fils de Louis Audemars.  Celui-ci n'avait pas été obligé, comme ses frères, de quitter le Crêt-Meylan  pour parachever ses connaissances. Il put assimiler sous le toit paternel,  lorsqu'il eut atteint l'âge de partager leurs travaux, tout le savoir acquis  par ses frères au près et au loin.
      Sa compétence  était telle qu'à la mort de son frère Adolphe il put prendre la direction de la  maison. Plus tard, après le décès de François, en 1865, il la partagea avec son  frère Auguste. Ce fut lui qui présida à la fabrication de toutes les montres  extra-compliquées qui firent la renommée de la maison lors des Expositions  Universelles de 1851, 1855, 1862, 1865, 1873, 1876, 1878 et 1879, et ce fut  encore lui qui organisa l'installation des vitrines de la maison à Paris et à  Vienne.
      Ce fut aussi  Charles-Henri Audemars qui, en 1868, inventa et construisit le premier outil à  découper le quadruple limaçon des minutes qui fait partie de la cadrature d'une  montre à répétition à minutes.
      David-Louis Golay, du Sentier, l'un des premiers  horlogers à fabriquer les parties de montres compliquées par procédés  mécaniques, utilisa cet outil et le perfectionna.
En 1849, la maison Louis Audemars produisit la première montre à remontoir au pendant à deux ressorts, et en 1851 la première pièce du même type portant la disposition perfectionnée du remontoir. En 1859, elle adapta aux montres à deux ressorts le système de double remontage qui venait d'être inventé par Louis-Elisée Piguet.
 En 1860, un progrès  important fut accompli simultanément par la maison Guillaume à Fleurier et par  la maison Louis Audemars à la Vallée.
      Deux de leurs  ouvriers, Louis-Elisée Piguet et Jules-Louis Piguet, exécutèrent la première  cadrature pour montre à grande sonnerie à étoile actionnante fixe, c'est-à-dire  dont l'axe était fixe au lieu d'être mobile, comme cela s'était fait  jusqu'alors. Cette simplification, qui était en même temps un progrès, augmenta  l'efficacité du mécanisme de sonnerie de sorte qu'il ne pouvait plus manquer.
      C'est vers cette  époque que la maison introduisit la première montre chronomètre à fusée à  remontoir et mise à l'heure au pendant. C'était une victoire technique, mais  une difficulté apparemment insurmontable se dressa aussitôt.
      Contrairement au barillet,  ou couvercle du ressort-moteur, qui tourne continuellement dans le même sens,  la fusée, lorsqu'elle est remontée, doit rétrograder pour actionner le rouage.  Par conséquent, elle doit alors être immédiatement libérée de son cliquet, ou  ressort d'engagement.
      Dans les systèmes en usage à l'époque, le cliquet n'était  engagé qu'à chaque mouvement de la main, ce qui rendait inefficace tout le  dispositif.
      Le système de  remontage introduit par la maison Louis Audemars pour ce chronomètre à fusée se  dégageait automatiquement dès que le ressort était complètement remonté et que  le doigt d'arrêtage avait produit son effet.
Deux autres innovations furent introduites en 1881. En étudiant à nouveau les calibres, et en modifiant la position du remontoir plutôt que celle du rouage, comme cela avait été le cas jusqu'alors, on vit que le même calibre pouvait servir à la fois pour les montres de poche ordinaires et pour les montres savonnettes, l'aiguille des secondes restant sur six heures dans les deux cas.
  Une nouvelle  étude des calibres des montres à répétition, en avril de la même année, montra  que la même cadrature, les deux marteaux étant rapprochés, pouvait être  utilisée à la fois pour les répétitions à quarts et à minutes. Cette nouvelle  disposition, combinée avec un mécanisme de calendrier perpétuel, permit une  importante économie de hauteur.
Une nouvelle  étude des calibres des montres à répétition, en avril de la même année, montra  que la même cadrature, les deux marteaux étant rapprochés, pouvait être  utilisée à la fois pour les répétitions à quarts et à minutes. Cette nouvelle  disposition, combinée avec un mécanisme de calendrier perpétuel, permit une  importante économie de hauteur.
      La même année, en  plus de diverses améliorations se rapportant au remontage des montres à deux  ressorts de barillet, la maison inventa un mouvement de chronographe simplifié  dans lequel, au moyen d'un mécanisme composé de quatre parties, l'aiguille de  chronographe pouvait être arrêtée et renvoyée à zéro par deux pressions sur le  même poussoir.
 En 1867, la  maison adapta son système de remontage au pendant à une montre à trois  ressorts, le deuxième étant automatiquement libéré lorsque le troisième était  remonté. L'expérience ainsi acquise fut utilisée dans la fabrication de la  montre extra-compliquée qui fut présentée à l'Exposition Universelle de Paris,  en 1878.
      Cette pièce  remarquable, la plus compliquée de l'époque, comportait trois rouages  distincts. Elle comprenait une grande et petite sonnerie, sonnant les heures et  les quarts d'heures en passant, une répétition à minutes, un quantième  perpétuel avec phases de lune, un chronographe rattrapante au cinquième de  seconde dont l'aiguille compteur du chronographe était fixée sur le même axe  que l'aiguille des secondes, et un dispositif d'heures indépendant inventé par  la maison, qui était le précurseur des montres à heure universelle modernes. On  l'appelait alors montre à longitudes, ou montre de voyage à deux cadrans.
      Sur  les prototypes, l'avance ou le retard des heures devait être effectué, mais en  décembre 1870 parut la première montre sur laquelle, lorsqu'on mettait les  aiguilles d'un des cadrans sur le nom d'une localité principale d'un secteur  géographique donné, on pouvait immédiatement lire sur le deuxième cadran  l'heure de la ville vers laquelle le voyageur se dirigeait.
      La couronne de  remontoir, par sa tige, remontait les trois ressorts à la fois, et la double  mise à l'heure des deux mouvements indépendants était également effectuée par  la même tige. Cette montre, qui comportait un thermomètre métallique, avait un  spiral cylindrique et 45 rubis.
      C'est pour cette  montre que la maison reçut la croix de la Légion d'Honneur, et ce fut l'un des  cas très rares où cette distinction ait été décernée pour un fait qui n'était  ni politique ni militaire. En même temps, la première médaille d'or de  l'Exposition et le Diplôme d'Honneur de l'Académie nationale de France lui  furent également décernés.
Nous ne pouvons indiquer ici que quelques-unes des réussites qui marquèrent l'histoire de l'horlogerie au dix-neuvième siècle : deux montres exposées à Vienne en 1873 avaient un diamètre inférieur à 30 mm. Chacune comportait une répétition à minutes et un quantième perpétuel.
 Le 15 mai 1878,  la maison sortit une répétition à minutes de 18 mm de diamètre. Un pareil tour  de force n'avait encore jamais été accompli dans l'histoire de l'horlogerie, et  on n'en connaît que deux autres, ceux d'Audemars Piguet et de Lucien Golay.
      A la même  exposition de Vienne fut présentée la montre No 11562, chronographe à double  cadran, l'un se trouvant sur le mouvement et l'autre dessous. D'un côté était  un chronographe rattrapante, et de l'autre un chronographe simple; chaque  mécanisme travaillait indépendamment, c'est-à-dire que les trois aiguilles de  retour à zéro fonctionnaient sur le même axe.

Montre No 10859, avec répétition à minutes, quantième perpétuel avec phases de lune, double mécanisme d'heure, l'un à répétition, l'autre donnant l'heure sidérale, secondes indépendantes, rattrapante système Pouzait, thermomètre métallique, 44 rubis.
      Le 23 avril 1878  fut achevée la montre No 12200. Elle avait le même mécanisme de double  chronographe que celle No 11562, et en plus une répétition à minutes, une  grande sonnerie et un calendrier perpétuel avec phases de lune. En outre, elle  comportait une aiguille de secondes indépendante système Pouzait.
      Le 30 mars 1876  parut la montre No 12379 qui avait toutes les complications de la précédente,  et en outre le double cadran des longitudes ou cadrans de voyage, ainsi qu'un  thermomètre, et, le 15 décembre 1876, une montre grande sonnerie de 30 mm de  diamètre.
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