 
 
Par David Chokron
La précision a été le moteur essentiel des progrès de l’horlogerie. Mais à un moment de son histoire, la chronométrie est devenue secondaire, cédant la place à des questions de prix et d’image. Quelques horlogers contemporains la remettent au centre de leurs préoccupations et de leur légitimité. Qui sont-ils ? Que font-ils ? Comment le font-ils ? Voici quelques précisions.
 Cela fait trois ou  quatre années que la chronométrie est redevenue un véritable enjeu horloger, pour  plusieurs raisons.
Cela fait trois ou  quatre années que la chronométrie est redevenue un véritable enjeu horloger, pour  plusieurs raisons.
      La première est que la recherche de nouveaux matériaux est  une des solutions pour desserrer la mainmise du Swatch Group sur quelques  pièces fondamentales, ancre, balancier et surtout spiral. Mais lorsque l’on  crée une alternative, il faut démontrer qu’elle est au moins aussi bonne que ce  qu’elle remplace. Et la précision de la marche est un indicateur synthétique qui  apporte cette preuve.
      
      La seconde est que la concurrence entre les marques est  féroce dans le haut de gamme. Elles cherchent à se différencier par tout ce qui  leur tombe sous la main. Parmi l’arsenal des arguments, la technologie joue un  grand rôle, en particulier pour les marques plus petites, plus récentes ou plus  rupturistes. Pour elles, une approche par la chronométrie est doublement légitimante.  Elle les raccroche à l’horlogerie historique et c’est un axe de recherche  pragmatique. Utile quand on est accusé de faire du concept qui ne fonctionne  pas, comme on le reproche parfois à ces petites officines.
Preuves et épreuve
        Enfin, le retour  d’un Concours de Chronométrie a remis le sujet sur la table après trente ans  d’absence. Quelques marques (dont certaines importantes) acceptent de s’affronter  sur un terrain neutre et objectif. Cela prouve que la question de la précision  est (la seule ?) à même de transcender les égos et les logiques de groupe.  Car le fait demeure pour un certain public exigeant: une montre mécanique  d’un certain prix doit être précise, sans quoi elle est insignifiante.
        On a  longtemps cru que le tourbillon était une solution destinée à augmenter la  précision. Mais cet outil est comme les autres : on lui fait faire ce que  l’on veut. En l’occurrence, assurer le spectacle et affirmer un degré  d’exclusivité supérieur.
        Il a fallu le Concours de Chronométrie de 2009 pour en  prouver la pertinence. Et encore s’agissait-il d’une pincée de montres, un échantillon  non représentatif des plus de 50 marques qui vendent un tourbillon. Or la chronométrie  a des ressorts multiples. La précision de la marche est la résultante de…  absolument tout. Elle est influencée par tous les facteurs, internes comme  externes de la montre. Et elle occupe une place particulière dans l’esprit de certains  fabricants, qui s’appuient dessus et la font prospérer. Ils travaillent à la  marge, en grappillant peu à peu des secondes d’écart de marche par semaine ou  par mois. C’est cela, la qualité. Alors quelles sont les techniques et points  d’application de cette nouvelle chronométrie ?
 Promener le spiral
Promener le spiral
        On l’a assez dit,  le tourbillon met le balancier et le spiral dans un nombre de positions variées  en les faisant tourner sur eux-mêmes pendant qu’ils oscillent. Ce faisant, il  réduit l’influence de la gravité sur l’organe réglant. Mais c’est un mécanisme  très complexe, qui peut être abordé différemment, quitte à réduire le nombre de  positions que le spiral prend.
        Quand certains (Jaeger-LeCoultre, Greubel  Forsey, Franck Muller) multiplient les axes de rotation pour augmenter la  variété des positions, certains faisaient l’inverse.
        En 2009, Zenith présentait  son concept Zéro Gravity, qui n’est en rien un tourbillon, depuis repris dans  le modèle Christophe Colomb. L’échappement y est monté sur des cardans et il  est toujours à plat, la position où il règle le mieux.
        Cartier a utilisé une  solution proche avec son Astrorégulateur. L’échappement monté sur son micro-rotor  ne peut se situer que dans deux positions. A plat ou une unique position  verticale. Il suffit de régler en conséquence. Cartier affirme régler à +1 s.  par jour, au porter comme en tests.
        Jacob&Co a également proposé la  Cyclone, un mouvement développé par La Fabrique du Temps, dont l’échappement  est monté sur le rotor. A noter, ces trois systèmes font une abondante  utilisation de différentiels complexes.
        Enfin, Hautlence a solidarisé l’axe de  son balancier d’une heure sautante. Dans la HL 2.0, l’échappement fait un tour  de 60 degrés toutes les heures, à chaque fois que l’heure sautante avance. Toutes  ces solutions évitent les effets de la gravité avec une technique alternative  au tourbillon. Mais si la gravité est l’ennemie de la précision, c’est de bien  d’autres manières, plus complexes encore.      
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