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Le billet horloger
Minute, précisions!

Par Joël A. Grandjean /TàG Press +41


Les people servent-ils l’horlogerie ?

A part engraisser l’ego de certains CEO, la présence des peoples dans les soirées horlogères peut-elle éventuellement servir à quelque chose? Les stars font-elles encore vendre?

Pour avoir fait mes premiers pas dans le journalisme people, à l’heure où les touristes de la profession se coltinaient ce que personne ne voulait faire, je peux vous affirmer que les yeux pailletés des stars sont capables d’émerveillements sincères et de réelles affections pour la chose horlogère. Côté femmes, il est vrai, la porte d’entrée restant les vertus joaillières d’une montre, si possible optimalement endiamantée, avant d’arriver un jour peut-être, à une perception plus horlogère. Les vedettes sont avant tout un excellent public pour les marques. Et qu’importe si leur statut leur permet d’accéder plus rapidement, grâce aux petits-cadeaux-qui-entretiennent-l’amitié, aux connaissances qui renforcent leurs inclinaisons naturelles, leur notoriété sert, qu’on le veuille ou non, la cause globale de la branche, soudain éclairée par leurs incursions. Quant aux CEO et à leurs équipes invitantes, ils traînent encore ça et là un restant d’attitude fan, c’est donc du donnant-donnant.

Gwyneth-Paltrowzidane jean renoelle macphersonvincent perez

diane krugerPaillettes et tapis rouges.
La mode des Red Carpets, réservée jusqu’ici aux marches cannoises du Palais des Festivals ou à d’autres concentrations showbiz côté US par exemple, a gagné Genève et le SIHH. Vous savez, ce genre d’arrivées orchestrées et interminables, où, d’une limousine aux vitres si possible teintées, s’extraient d’abord une paire sublime de jambes, puis le buste et tout ce qui suit d’une créature censée déclencher les vivats. Limite frustrantes, ces mises en bouches destinées à capter le crépitement des flashs, se terminent plus ou moins vite selon que la star tournicote ou non sur elle-même, faisant durer la procession. Etonnamment, nombre de journalistes jouent le jeu, bien qu’exclus la plupart du temps des soirées où s’engouffrent ces créatures, laissés sur le carreau de l’antichambre, malgré leurs badges et leurs autorisations.

En 2011, c’est Baume & Mercier et son CEO Alain Zimmermann qui se sont aventurés sur cette moquette, rivalisant sans complexe, à grands renforts de Gwyneth Paltrow, de Vincent Pérez et de Mathilda May avec la désormais traditionnelle IWC Night où les Zidane, les Jean Reno discutent le bout de gras avec les Elle Macpherson, Cate Blanchet, ou quelqu’autre beauté égarée. Le top, c’est quand ces beautés s’égarent même dans les couloirs feutrés du SIHH ou du GTE. Comme Diane Kruger venue célébrer chez Jaeger LeCoultre le 80ème anniversaire de la Reverso, comme Sébastien Loeb en pleine cogitation horlogère chez Marvin.


Clins d’œil et grosses dépenses.

omega kidmanTrès peu nombreuses sont les vedettes qui signent de juteux contrats avec les marques. La branche, un temps grisée par cette mode dite des testimonials, lancée il faut le reconnaître par Jean-Claude Biver du temps où il sévissait chez Omega, était prête à dépenser des fortunes pour entendre de la délicieuse bouche d’une Cindy Crawford ou d’une Nicole Kidman un "Omega, my choice". Crédible? Si en plus le métier de la VIP est de jouer la comédie, alors ça peut le faire. Il paraîtrait qu’Omega, pour l’ouverture de sa boutique à Genève en 2007, craqua environ 600'000 francs suisses pour une apparition de la rousse australienne. Elle fit bonne figure, s’avéra docile, et donna l’impression qu’une longue familiarité l’unissait avec feu Nicolas Hayek. Un tel montant, ça crée des liens.

Pour ce qui est de Georges Clooney, également contractualisé chez Omega, l’horloger eut affaire à un concurrent inattendu, Nespresso. Au point qu’on pourrait presque penser que le slogan horloger soit devenu Watch Else comme le suggère un nouveau magazine horloger exclusivement diffusé via les tablettes mobiles, lancé par l’ancien rédacteur en chef de Heure Suisse et Heure Schweiz, Thierry Brandt. Il y aurait donc mélange des genres et un peu de friture sur la ligne de l’appartenance.

tiger woodsDérapages et conséquences.
Autre danger que celui de la dissolution du message, la dissolution des mœurs ou des images chez les personnalités choisies. Quand il s’agit de drogue, c’est grave, ça ne pardonne pas. Les sponsors se détournent immédiatement. S’il s’agit de polissonneries ou de galipettes, les réactions sont différentes selon que le marché soit réputé puritain ou…. Ainsi, Jean-Christophe Babin expliquait, en face d’une assemblée conviée par le GJD Groupement des Jeunes Dirigeants et invitée à suivre une table ronde à Neuchâtel sur le rôle des ambassadeurs, pourquoi il n’avait pas lâché son infidèle de golfeur Tiger Woods, au plus fort de sa tourmente. Certes, aux USA par exemple, la vindicte populaire imposa le profil bas. Sa figure se fit plus rare sur les affiches, jusqu’à ce que foudre médiatique retombe. En Chine et en Asie au contraire, il en fut tout autrement. L’homme aux maîtresses cachées et nombreuses, pris la main dans le sac, avait gagné en sympathie, incarnant aux yeux de cette partie du monde, une virilité hors norme. L’affichage fut dont discrètement intensifié.

Pré-carré des marques de volumes.
Une constante demeure dans ce genre de partenariats. Il ne peut être le fait que de marques dites de volumes. Des enseignes qui produisent annuellement suffisamment de pièces pour être en mesure d’occuper tous les terrains de la communication, celui des testimonials n’en étant qu’un parmi d’autres. Il restera toujours des territoires réactifs à ce mode publicitaire, comme l’Inde par exemple.
Selon David Sadigh, directeur-associé de l’agence IC-Agency, spécialiste en marketing interactif, le partenariat Audemars Piguet et Sachin Tendulkar, un célèbre joueur de cricket, a affolé la toile et servi extraordinairement bien la notoriété de la marque. Reste que, sous nos latitudes, la formule s’essouffle: les stars font moins rêver et, à lire leurs posts sur Twitter, s’éloignent sans cesse un peu plus de leur inaccessibilité. Finalement, elles sont comme tout le monde. Pire, de quel droit dicteraient-elles nos goûts? Odile Habel, Rédactrice en Chef du magazine Hors-Ligne et de Paris-Match Suisse est farouchement agacée par cette pratique qui, auprès d’une certaine frange de la population, aurait même des vertus contre-productives.

Tendance no cash, affaires échange.
En marge de cette surenchère, certains patrons horlogers touchent le jack pot sans bourse délier. C’est le cas de Pierre Koukjian, co-fondateur et designer de la marque deLaCour. Lui-même looké artiste, il accepte il y a quelques années, une commande spéciale et rémunérée pour le footballeur Samuel Etoo’s. Depuis, à croire que dans les vestiaires les joueurs ne font pas que disserter sur leurs constitutions, ses Bichronos ont portées par les plus grandes stars mondiales du foot. Il semblerait que même Beckham, pourtant sous contrat pour une autre marque, ait également succombé à la tentation. Peut-être sous la pression d’un Ronaldo qui lui, les arbore ostensiblement, mieux, les encense chaque fois qu’un média lui pose la question. Le plus incroyable de cette histoire, c’est qu’il les achète, parfois pour les offrir à ses proches.

Certes, durant le SIHH et à portée de son show-room genevois admirablement situé entre les hôtels Richemont et Beaurivage, deLaCour aurait tout de même sorti le grand jeu conre espèces trébuchantes pour s’approprier un José Mourinho, fraîchement élu meilleur entraîneur de l’année par la FIFA. On parle de 400'000 euros, à moins que le couac de la soirée FIFA ne soit prétexte à différer quelque versement. En effet, courtisé par l’infatigable Jean-Claude Biver, sponsor officiel de la FIFA, le coach du Real Madrid s’est bêtement laissé photographier avec la Big Bang qu’il venait de recevoir, tandis que se peaufinait la montre à son effigie, la deLaCour Mourinho City Ego Collection.

agassi grafAutre marque à avoir su s’offrir les high ways du celebrity marketing à moindre frais, c’est Hamilton. Vincent Perriard, ex-CEO de Concord et de Technomarine, se souvient de la technique Hamilton pour y avoir été associé, à l’heure de ses américaines épopées. Un processus simple et efficace. Rémunéré par la marque, un insider situé sur le passage des scénarios hollywoodiens, alerte la marque chaque fois qu’un paragraphe fait référence à une montre. La maison de production est alors contactée, avant même que le film ne soit tourné. Le deal est clair. Placer des montres, parfois créées pour l’occasion comme dans le film Men In Black avec Will Smith, moyennant la mise à disposition d’affichettes placées, lors du lancement, dans les vitrines de chaque détaillant Hamilton dans le monde. Bien vu, car au final, peu de cash et des méga stars hollywoodiennent qui portent des Hamilton au nez et à la barbe de leurs agents.

Charity business, l’attrape stars.
Comme l’heure vire à la communication responsable, un stratagème permet d’attraper une célébrité sans trop dépenser. Surtout si elle est à la tête d’une fondation humanitaire. Il suffit de lui faire miroiter un chèque substantiel, souvent alimenté par le reversement d’un pourcentage sur la vente d’un modèle à ses couleurs, pour qu’elle se déplace avec en son sillage, à moindres frais, son capital notoriété. Chopard a initié le phénomène, lançant des modèles pour les Fondation José Carrera, Sir Elton John voire pour le Prince Charles d’Angleterre. Hublot s’est offert la totale avec en détournant Usain Bolt d’Athlétissima, l’espace d’une demi-journée.

ebel louise miss pandoraHélas, ces nobles causes, parfois animalières, ne sont que très rarement portées sur l’aide d’êtres humains qui ne paient pas de mine, comme en Afrique, en Haïti ou autres régions épargnées par le glamour. Qu’elle est loin l’élégance inégalable d’une Audrey Hepburn sponsorisée par Longines, pour sa Children’s Fund Fondation. Ouf, la marque s’implique dans les organisations caritatives du couple André Agassi et Stéphanie Graf.

EBEL, Louise remplace Gisèle…
Marc-Michel Amadry, Président et directeur création d’EBEL confirme une tendance qui consiste à redonner au produit la première place. La marque, troque les rondeurs enceintes de Claudia Schiffer ou les charmes engageants de Gisèle Bündchen pour un éloge de ses montres par le photographe Mitchell Feinberg. Visuels et making off sublimes…. Soudain, au détour d’un surf, une certaine Louise Ebel fait son apparition dans le paysage de la marque. Elle est blogueuse, de plus en plus célèbre, celle que l’on surnomme Miss Pandora est partout. Naturellement, la marque lui organise quelques shootings mémorables dans les alcôves de la Villa Turque à la Chaux-de-Fonds. Les temps changent, Louise Ebel toise le Corbusier, un tantinet espiègle.

naomi campbelEt du côté des stars…
Les pièces joaillières sont elles aussi des pièges à stars. Chopard et de Grisogono, avec Fawaz Gruosi sont passés maîtres dans le prêt ‘arrangé’ de bijoux et de montres, avec garde du corps loué le temps d’une soirée, des fois que la vedette décide que la valeur de sa notoriété vaut plus que le bijou confié.
Au festival de Cannes par exemple, la mécanique est si bien huilée, qu’une suite au Majestic est transformée en dressing room. Le prêt? On murmure même que, pour décrocher la brochette et écarter les quelques enseignes concurrentes qui se trouvaient déjà dans la place avant leur arrivée comme sponsor du Festival, ils n’hésitèrent pas à rémunérer les VIP qui les choisissaient.
Défilé de vedettes donc, choix et privilèges, puis, idéal pour épater la galerie, un garde du corps qui vous suit partout. Parfois, le prêt ‘payé’ se transforme en achat à prix super cassé parce qu’il y a rien de plus pathétique, réminiscence du syndrome de Cendrillon oblige, que de se retrouver, après minuit, dépourvu de brillance face au miroir de l’après fête. Il se peut aussi qu’un début d’amitié se tisse, entre horloger et personnalité. C’est toujours sympa pour le prochain anniversaire de la marque, que de pouvoir compter, moyennant frais de déplacement, logement, défraiement payé cash et sans reçu ou bijou spécifique, sur une brochette de stars. Qui, entre elles, utilisent le nom de «ménages» pour qualifier cet échange de bons procédés ainsi que les menus gains éventuels qui en découlent.

elton john

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